Dans les bars et maquis du Bénin, les serveuses incarnent un rôle central dans l’animation nocturne. Pourtant, derrière leur sourire commercial se cache une réalité triste, marquée par la précarité, l’exploitation et une frontière floue avec la prostitution. Ces jeunes femmes, souvent issues de milieux modestes, entrent dans ce métier pour subvenir à leurs besoins. Mais au-delà de leur fonction officielle, certaines se retrouvent impliquées dans un système où les propositions indécentes et les relations tarifées ne sont qu’un prolongement insidieux de leur travail.
Avec des salaires oscillant entre 25 000 et 50 000 francs CFA, le revenu principal de ces employées repose sur les pourboires. Une dépendance qui les expose aux abus d’une clientèle avide de “service personnalisé”. Dans certaines buvettes de Cotonou et Porto-Novo, cette dynamique est presque institutionnalisée : tenues provocantes imposées, encouragements implicites à flirter avec les clients, et tolérance des employeurs à l’égard de relations extra-professionnelles. Ces pratiques transforment le métier de serveuse en un terrain glissant vers une prostitution déguisée.
Si certaines y voient une opportunité de revenus supplémentaires, d’autres dénoncent une pression insoutenable et un isolement social. “Nous sommes jugées dès que nous mettons un pied dans un bar”, confie une serveuse de Cotonou. La stigmatisation, ajoutée aux conditions de travail difficiles, plonge ces femmes dans un cercle vicieux, où dignité et respect semblent hors de portée.
Malgré tout, le silence reste la norme. Les propriétaires de bars privilégient leurs profits, tandis que les autorités ferment les yeux sur un secteur largement informel. Mais face à l’ampleur du problème, des initiatives restent timides.
Le travail de serveuse dans les bars du Bénin n’est pas seulement une question économique. Il reflète une société qui tolère, voire banalise, l’exploitation des femmes sous des formes déguisées. Une prise de conscience collective est nécessaire pour que ces travailleuses cessent d’être les victimes invisibles d’un système qui les fragilise. Derrière chaque plateau servi, il y a une histoire, souvent marquée par la lutte, l’humiliation et l’espoir d’un avenir meilleur.
Tibauth k.OTCHERE